Mais c'est facile pour des parents de gérer un gamin qui vrille ? Mettre ça systématiquement sur le dos d'une mauvaise éducation de leur part c'est un peu simplifier le problème, non ? T'as été adolescent, non ? Et tu sais à quel point à cet âge on peut être fermé aux "conseils" de ses parents et n'en faire qu'à sa tête ?
J'ai un collègue en reconversion, qui a grandi dans un quartier chaud de Nantes (Malakoff), un type vraiment super, très ouvert (et musulman pratiquant pourtant, comme quoi
) avec qui j'ai eu beaucoup de plaisir à échanger sur ces sujets. Il me parlait de quelques potes d'enfance qu'il a vus mal tourner, dont certains sont aujourd'hui en prison. Des potes avec des parents aimants, sévères, pas du tout laxistes, qui font de leur mieux malgré les difficultés du quotidien (pour mon collègue, un père marocain ouvrier agricole arrivé en France en connaissant 3 mots de français, une mère femme au foyer qui ne parle pas un mot de français, 5 gamins à éduquer dans une tour avec des moyens misérables !). Mais des parents qui peuvent parfois échouer, voir un membre de la fratrie partir en vrille alors que les autres ne posent aucun problème. Parce qu'un incident les fait basculer (un contrôle de police qui tourne mal par exemple), parce qu'un fait d'actualité les a scandalisés, parce qu'ils ont une mauvaise fréquentation, parce qu'un jour ils ont fair une connerie pour suivre les potes ou ne je ne sais quoi. Y a plein de choses (encore plus dans ces quartiers) qui peuvent se passer, tu peux pas être tout le temps derrière ton gamin. Et il me parlait de l'impuissance des parents dans ce cas, du malheur et de la honte qui s'abattent sur eux. Que malgré les conneries de leur gamin, ça reste quand même leur enfant. Et la solution promue par certains (enfin, la Droite bête quoi) ce serait de supprimer les allocations à ces parents en difficulté ? (et du coup précipiter le reste de la fratrie dans les difficultés également).
C'était intéressant également de l'entendre parler du ressenti qu'il avait dans son quartier d'être mis de côté (et pourtant Malakoff c'est à 10 minutes du centre de Nantes), d'être un sous-citoyen, d'être enfermé dans son quartier sans avoir les mêmes accès que les autres français à la culture, à la connaissance, au monde, à une bonne éducation. Et à quel point il s'était longtemps lui-même fixé des barrières parce qu'il avait un complexe d'infériorité ou parce qu'autour de lui il n'avait pas d'exemple de personnes qui avaient réussi (à part des footballeur en gros, et il n'était pas bon au foot
Heureusement des profs l'ont poussé à essayer d'aller plus loin dans ses études, il a fini avec un BTS et l'ascenseur social a clairement marché pour lui
Ce sont des choses qu'on devine, mais l'entendre de la bouche de quelqu'un qui est concerné, ça fait réfléchir. Si on veut résoudre durablement les problèmes de délinquance, ça passe aussi par des mesures sociales, culturelles et éducatives, pas uniquement par de la répression (même si elle est évidemment nécessaire) et surtout pas par des mouvements de menton de nos politiques et des solutions populistes qui servent juste à flatter des sentiments de haine et de colère de certains citoyens.