Tout a été dit et bien dit sur ce match, sur les valeurs collectives affichées, et sur un des rares clean sheets de la saison. Les joueurs ont fait preuve d'abnégation, et on retrouve enfin des séquences intéressantes et des sorties de balle maîtrisées comme on en voyait en début de saison dernière.
Je voudrais insister sur trois points qui me semblent vraiment intéressants :
Premièrement, RLB. On l'a beaucoup critiqué quand l'équipe ne tournait pas, à juste titre il me semble, et il est normal de souligner le travail qui a été réalisé (et bien réalisé) à l'intersaison quand l'équipe affiche du mieux. Le côté Dexter qui défouraille a fait couler beaucoup d'encre, en particulier autour de la question du responsable du recrutement (Zarrak il me semble) qu'on a débarqué rapidement. On était nombreux (moi le premier) à se demander si ça ne ressemblait pas à un coup de force de la part de quelqu'un refusant d'accepter ses propres échecs, et si Zarrak n'était pas un fusible commode pour justifier le début de saison raté. Quand on voit l'apport des nouvelles recrues (Louza, Katseris et Bamba), on peut se demander si RLB n'avait pas raison au fond, et si la purge dans le staff n'a pas également assaini certaines choses. On a dépensé moins, et on voit du mieux.
RLB peut aussi se targuer d'avoir su (re)mettre en place un football attrayant, avec des prises de risque calculées, des sorties de balle intelligentes et efficaces (on a plusieurs fois cassé le pressing rémois en mettant quatre ou cinq joueurs hors de position), et on a gagné en maîtrise dans les trente derniers mètres avec des séquences de possession plus abouties, un ballon qui circule mieux. On voit moins les percussions stériles qui étaient notre marque de fabrique avant, et en même temps on s'appuie sur un milieu renouvelé pour éviter que chaque passe en arrière ne revienne jusqu'aux défenseurs. Le quatuor Ponceau-Louza-Abergel-Kari permet de rapidement remettre le ballon dans le sens du jeu même quand les latéraux reviennent en arrière, et de jouer efficacement les une-deux qui permettent de faire progresser l'équipe. Hier encore, on en a vu beaucoup dans les zones offensives, et les Rémois ont eu du mal à contrer les déplacements entre les lignes de ces quatre là.
Tout n'est pas parfait évidemment, mais chapeau bas au coach qui a été pas mal remué, et qui semblait avoir perdu de vue ce qu'il voulait proposer. Quelques victoires sans la manière n'auraient clairement pas restauré ma confiance en lui, mais la métamorphose de son jeu depuis quelques semaines donne vraiment de l'espoir pour la suite. Espérons que cette seconde année mouvementée lui aura permis de tirer de précieuses leçons pour le reste de sa carrière, notamment dans la gestion des cadres (je digère toujours assez mal la situation de VLG), et dans la capacité à créer une harmonie au sein du vestiaire.
Deuxième point sur lequel je trouve intéressant de revenir : le niveau des joueurs. On a beaucoup parlé du départ de Faivre dans un débat autour du niveau intrinsèque (potentiel, disons) et du niveau affiché réellement dans l'équipe. L'idée est de savoir si on s'affaiblit en se privant de joueurs très talentueux sur le papier, pour privilégier des joueurs sans doute moins forts, mais qui forment un collectif plus homogène.
Je suis content de constater qu'un collectif mieux structuré semble l'emporter sur un ensemble d'individualités. Sans Faivre, Makengo, B. Mendy et Bakayoko titulaires, on arrive à voir du football, du jeu au sol, une véritable construction depuis la ligne arrière, jusqu'à réussir à toucher nos attaquants. Evidemment, on voit aussi les limites de ce système (on a parfois du mal sur certaines phases de relance, on a manqué beaucoup de passes hier, et on sent moins les joueurs capables de faire différences individuellement quand l'équipe est bloquée), et je suis sûr qu'un Faivre mieux encadré par des directives plus claires aurait pu s'éclater dans le football qu'on produit depuis trois semaines. Mais cela supposait pas mal d'efforts. Aujourd'hui, on voit des joueurs plus proches les uns des autres, et ça aide chacun à mieux jouer son jeu.
Il y a deux joueurs qui surprennent particulièrement : Ponceau et Touré. Le premier a connu des hauts et des bas au FCL, et il a énormément souffert de son déficit physique, dans un groupe où les différences se faisaient individuellement. Là, il retrouve vraiment une assise dans le jeu, et sa passe pour Katseris hier en est la plus belle manifestation. Son renversement de jeu a totalement déstabilisé le bloc rémois, qui était pourtant bien en place jusque là, et ça faisait plaisir de le voir rayonner dans ce registre. Depuis combien de temps n'avait-on plus observer de telles séquences et de telles prises de risque ? Son axe de progression reste la frappe, mais il tente de plus en plus souvent et va finir par s'améliorer dans ce registre. Pour Touré, je le trouve vraiment mieux balle au pied, son timing semble meilleur, et il a vraiment essayé de relancer court de manière pertinente. Parfois c'est manqué, mais on voit beaucoup plus de sérieux et de sérénité depuis quelques matches. Sans doute que la mise à plat de tout ce qui n'allait pas lui a fait du bien, et lui a remis la tête à l'endroit. Ca reste encore perfectible, mais sur les trois derniers matches c'est peut-être le défenseur le plus régulier.
Ces joueurs se révèlent aussi par le collectif, c'est plus facile d'être efficace dans sa zone quand les partenaires le sont dans la leur, et quand les efforts sont faits. Talbi en parlait dans son interview d'après-match, sur le fait que tous les joueurs font les efforts, et que le collectif est bien plus costaud ainsi. C'est aussi pour ça qu'on sent la différence avec les entrants. Bouanani est sans doute très technique, mais il ne fait pas les mêmes courses. De même F. Mendy qui est très volontaire défensivement, mais qui n'est pas vraiment un piston et qui n'apporte pas la même chose sur le couloir droit en termes de courses offensives (celles qui font que l'adversaire ne peut pas s'installer tranquillement dans notre camp). Il faut espérer que des joueurs comme Kalulu pourront s'intégrer à la rotation rapidement (pour remettre Formose dans l'axe) et que Yongwa va récupérer pleinement (pour remettre TLB au poste d'ailier).
Le troisième et dernier point tient aux perspectives d'avenir et aux leçons qu'on peut déjà commencer à tirer ce renouveau du collectif. Premièrement, il est clair que la cellule de recrutement va devoir revenir aux fondamentaux et recruter des joueurs non pas sur l'opportunité financière, l'agent ou le coup médiatique, mais en fonction des besoins sportifs finement analysés, et des manques réels de l'effectif. Commencer la saison en perdant Le Fée et en le remplaçant par Bakayoko, ça nous a mis dedans pendant toute la première partie de saison, et on voit bien qu'avec un milieu relayeur notre jeu s'éclaire mécaniquement. J'espère d'ailleurs qu'on saura aligner les millions sur Louza et Kari si cela est possible, comme on a pu le faire pour Dieng, Grbic, Makengo, Mvuka, etc. Par ailleurs, même si on doit perdre des matches dans ce championnat, il est nettement plus agréable de le faire en jouant au ballon plutôt qu'en renonçant à nos principes. J'espère qu'on s'accrochera à ceux-ci non pas de manière dogmatique, mais bien parce qu'à chaque fois on constate que rechercher la passe avant le dribble, le collectif avant l'individu et la technique avant le physique, cela nous permet d'obtenir de bons résultats. On doit certes progresser dans pas mal de registres (on n'est que le FCL), mais autant le faire sur le socle qui est le nôtre depuis tant d'années, en recrutant des joueurs qui s'insèrent parfaitement dans ce projet. Cela a toujours été le fondement de nos plus belles réussites sportives, et quand on voit comment s'éclatent des joueurs comme Bamba ou Katseris (qui sont généreux, qui font le pressing, qui donnent pour le collectif), on voit bien que ce n'est pas le prix, la division, l'agent ou le statut qui font le joueur, mais l'envie de faire des efforts et de jouer ensemble.
Autant de leçons essentielles qui doivent nous aider à repenser toute l'architecture du club, de la formation au recrutement, en passant par le staff. Si on veut continuer à exister en L1, il faut qu'on garde cette ligne, cette cohérence, cette exigence, même dans les inévitables moments difficiles.
|