Juste pour appuyer le propos avec quelques images, je poste ici plusieurs résumés de matches.
Citer :
2012-2013, Lorient-Nice :
https://www.youtube.com/watch?v=4i8D2VZWPvY-> Un premier but en contre sur une récupération haute ; une attaque placée qui finit sur le poteau ; un deuxième but sur une percussion balle au pied ; un troisième but sur une récupération en avançant qui termine par un contre à trois contre cinq.
Possession : 41-59
Score final : 3-0
2012-2013, ETG-Lorient :
https://www.youtube.com/watch?v=hq0tq_Xwhjc-> Un premier but sur une percussion à échange rapide ; un deuxième but sur un exploit solo consécutif à une longue ouverture. Après ça, c'est plus dur de juger vu que l'ETG prend un rouge, mais troisième but sur une récupération haute après une mauvaise relance du gardien, puis un quatrième sur pénalty consécutif à une percussion à deux contre trois.
Possession : 57-43 (malgré le rouge)
Score final : 0-4
2013-2014, Nice-Lorient :
https://www.youtube.com/watch?v=a8tzgsmrS-w-> Un premier but sur une récupération en avançant, percussion et transmission, puis frappe de loin ; Un deuxième but sur une récupération très haute en coupant les lignes de passe, contre-attaque, transmission et frappe à l'entrée de la surface.
Possession : 59-41
Score final : 1-2
2013-2014, Lorient-Ajaccio :
https://www.youtube.com/watch?v=8TKMhJM0yxE-> But sur un renversement de jeu rapide, percussion et centre. On peut aussi noter le beau contre à la fin du match, avec le duel manqué par Aliadière.
Possession : 46-54 (biaisée par le carton rouge d'Ecuele-Manga)
Score final : 1-0
2012-2013, Lorient-Saint-Étienne :
https://www.youtube.com/watch?v=yWAm7zGh4os&t=75s-> Premier but sur une attaque placée parfaite, jeu de passes rapides vers l'avant, puis centre ; deuxième but sur une attaque placée également, percussion balle au pied, et un centre excellent. On peut noter une récupération haute de Robert, qui percute à trois contre quatre. Le dernier but est sur un CF sublime de Jouffre (quelle patte !)
Possession : 45-55
Score final : 3-1
2012-2013, Lorient-Brest :
https://www.youtube.com/watch?v=nH8aSGaT8eQ-> Un premier but sur une attaque placée vraiment à voir et à revoir, avec enchaînement de passes en une touche et déplacements collectifs ; deuxième but sur une récupération en avançant et un contre mené pratiquement à deux contre cinq (et jamais aucune volonté de regarder en arrière) ; troisième but sur une frappe de loin consécutive à un corner ; quatrième but sur une combinaison en petit périmètre, une percussion et une (grosse) frappe.
Possession : 46-54
Score final : 4-0
Bon évidemment j'ai pris des victoires lorientaises, parce qu'on y voit forcément plus de buts, et que c'est plus facile de commenter les actions quand elles sont nombreuses. J'ai volontairement choisi des matches où Lorient n'a pas eu la possession, pour montrer que contrairement à ce que tu avances panaco, le jeu lorientais (que l'on voit apparaître sur ces vidéos, et qui se concrétise par les victoires) n'est pas strictement fondé sur la possession. On a pu gagner, largement, et contre des équipes de différents calibres, en n'ayant pas le ballon plus souvent que l'adversaire. En fait je pense qu'on ne s'entend pas sur le sens de "possession". Pour moi, un jeu de possession, c'est un jeu qui vise à avoir un possession supérieure à l'adversaire quoi qu'il arrive. Multiplier les passes pour priver l'adversaire du ballon. Quand tu dis que "pour faire des passes, il faut avoir le ballon", je te rejoins entièrement, mais je pense que dans le système de CG cette nécessité est comblée par la récupération en avançant. Evidemment, sur 90 minutes, c'est très difficile de jouer à un rythme soutenu, et les phases de conservation jouent un rôle pour donner des tempos différents à la partie, pour souffler, pour reprendre le contrôle du match et éviter d'être soi-même pris en contre. Mais je ne vois pas la possession (statistique) comme la clé de voûte du football de CG. C'est plutôt l'utilisation du ballon, et la capacité à en faire quelque chose collectivement sans le rendre bêtement à l'adversaire (et mécaniquement, quand l'adversaire n'a rien à opposer, on tient le ballon plus souvent). Par comparaison, dans le Lorient de Landreau, on affiche des statistiques de possession parfois affolantes, mais ce sont des passes latérales qui conduisent in fine à de longs ballons inutiles devant. Voilà pourquoi on aligne 60% de possession contre Nîmes, et aucun tir cadré. On ne va pas se mentir, il y a aussi eu des matches analogues avec CG, des parties où on a fait tourner sans prendre de risques, et où on s'est insurgés contre l'absence de prise de risque. Cela étant, la colère des supporters alors me semble être un indicateur suffisant pour dire que ce jeu stérile de possession n'était pas le "jeu à la lorientaise" (désolé rodi :p). Sinon ils auraient applaudi une telle maîtrise, non ? Je connais pas mal de supporters parisiens, qui apprécient sincèrement le jeu de possession étouffant que le PSG pratique en L1, alors que, malgré l'immense maîtrise technique des joueurs, je le trouve ennuyeux à mourir. Une ou deux fulgurances qui permettent de marquer, mais de la difficulté à imposer un rythme à la partie. Après on peut leur trouver comme circonstances atténuantes qu'ils jouent souvent contre des blocs retranchés.
Deuxième point essentiel, et là je rebondis sur "Du temps de CG on ne jouait pas en contre, c'était souvent un jeu bien construit avec des attaques bien placées." Les images parlent d'elles-même. On a beaucoup de buts en contre, et surtout une volonté évidente de jouer ces contres à fond. Les joueurs ne calculent pas, et dès qu'ils récupèrent la balle (que ce soit au début du match ou à la dernière minute), cherchent à se projeter rapidement vers l'avant. Je te renvoie au documentaire très intéressant sur l'intelligence collective, où CG évoque encore une fois la notion de respiration et la transition attaque-défense. Les attaques placées sont des phases de jeu différentes, qui répondent à une autre logique (incapacité à prendre l'adversaire à défaut dans cette transition, soit qu'il ne se livre pas, soit qu'il se replie très bien), mais elles ne sont pas l'alpha et l'omega du jeu de Gourcuff, contrairement à celui de Landreau (qui donne pour consigne aux joueurs de ne pas jouer les contres, et de revenir prudemment en arrière). La différence essentielle se situe là. J'ai essayé de le souligner dans les petits commentaires, pour ceux qui n'auraient pas envie de regarder toutes les vidéos, mais il y a énormément de "façons de marquer" différentes, avec du jeu court, du jeu long, des renversements ou des supériorités locales, des percussions ou des dédoublements, des combinaisons ou du jeu solo. Et forcément, le brin de talent qui vient sublimer tout ça. Quand je dis que Lorient a eu un jeu de contre, je ne dis pas qu'ils ne faisaient que ça bien entendu, mais la volonté théorique de faire mal à l'adversaire à la récupération du ballon (on n'y arrivait pas toujours, loin de là) était quand même très nettement supérieure à celle du FCL de Landreau, en particulier sur le début de saison où il verrouillait à cinq derrière.
Pour le reste panaco, je te rejoins à 100%, notamment sur la question des profils de jeu. La cellule de recrutement choisit des joueurs qui répondent moins à ce schéma, et c'est difficile d'évoluer dans un autre registre que le sien, surtout quand l'entraîneur n'est pas hyper talentueux et pédagogue. Les joueurs comme Wissa ont un profil assez compatible avec ce jeu rapide et technique, également parce qu'il cherche à combiner et à s'appuyer sur ses partenaires (c'est la donnée mentale dont ne dispose pas Bouanga, par exemple). Je pense que Claude-Maurice a également cette capacité, et son entente avec Guendouzi était assez évidente à ce niveau, même s'il a forcément des choses à peaufiner (dribble de trop, parfois il a du mal à lever la tête, etc.). Pour les autres, c'est selon. Je suis tout à fait d'accord également sur la question du milieu de terrain, coupé en deux au point qu'il n'y a pas de liant (sauf Guendouzi, qui a été capable de faire la jonction à plusieurs reprises). C'est d'ailleurs un phénomène récurrent à Lorient depuis plusieurs saisons, et on avait la même impression sous Casoni et Ripoll : une équipe qui explosait, sans cohérence. Je me souviens très bien d'un but qu'on encaisse la saison passée, sur une relance très longue de l'adversaire. Ciani arrive à la repousser de la tête, mais le ballon retombe dans un milieu de terrain totalement désertique, l'attaquant adverse récupère et arrive lancé sur la charnière. C'est une image qu'on voit un peu moins, mais il y a toujours l'impression douloureuse que la défense (et j'inclus Lemoine dedans) est livrée à elle-même parce que les milieux, notamment latéraux, ne font pas vraiment ce travail de sape. C'est la raison pour laquelle un joueur comme KMP était si précieux au collectif.