En général quand une équipe joue à onze contre dix, c'est là qu'on voit le mieux son plan de jeu se mettre en place. C'est quand l'adversaire est recroquevillé autour de son but que l'on voit le mieux les combinaisons en une touche de balle, les décalages, les renversements de jeu et les mouvements offensifs. Les risques de contre-attaque étant moindres, les joueurs sont généralement plus libérés dans leurs velléités offensives, et se lâchent un peu plus. Ca ne passe pas toujours, bien entendu, car une équipe qui sait défendre à dix peut être difficile à manœuvrer. Pourtant quand on voit le match d'hier, Lorient n'a rien montré collectivement, à part les montées ridicules de Saunier balle au pied qui s'est parfois retrouvé aux abords de la surface sans trouver de solutions près de lui. On a vu du travail côté droit, quelques centres pas inintéressants, mais contre une équipe regroupée c'est trop peu.
Je ne sais pas si un spectateur ayant regardé le match après la 45e minute aurait deviné qu'on jouait en supériorité numérique. On a même failli laisser le Gazélec en marquer un deuxième. Nos attaquants n'ont eu aucun ballon exploitable devant, et au niveau des décalages et du jeu dos au but, on a été d'une faiblesse extrême. Les talonnades pour personne, les contrôles ratés, le festival de mauvaises passes... Difficile de faire quoi que ce soit quand on ne maîtrise pas le ballon. A l'inverse j'ai vu Ajaccio capable de sécuriser le ballon devant pour donner un peu d'air à la défense. Armand je crois a été précieux dans ce rôle. Souvent en mouvement, capable de faire les bons choix, de se défaire du pressing pour gagner du temps.
Chez nous, qu'a-t-on pu voir ? Un milieu incapable de tenir le ballon et de le faire vivre, une défense bien fébrile sur les percussions individuelles, une attaque isolée, esseulée et maladroite, un coaching difficilement compréhensible (où était Etuin, pour stabiliser le milieu ? Pourquoi persister avec Courtet en 442 ?). Et même si ces changements avaient été apportés, Landreau ne fait pas faire vivre un système de jeu. A part les latéraux, qui fournissent beaucoup d'efforts, je n'ai pas pratiquement pas vu de passe-et-va, pas vu de combinaisons en une-deux, encore moins en une-deux-trois. Passer le ballon à Claude-Maurice ou à Cabot, c'est l'assurance de ne pas le revoir. Mettre un ballon en profondeur à Courtet, c'est l'assurance qu'il sera perdu. Il n'y aucune confiance collective, aucune entente entre les joueurs (combien de ballons échangés entre Courtet et Hamel ?)
Je ne me souviens pas avoir vu une circulation de balle rapide allant d'une aile à l'autre, en passant successivement par Cabot, Wadja, puis Lemoine et Claude-Maurice. On n'a jamais cherché à faire bouger le bloc adverse, on n'a jamais essayé de mettre de la vitesse. On a lancé beaucoup de ballons dans la surface, parfois avec une précision relative qui a forcé la défense du Gazélec a dégager en corner, mais je n'ai pas souvenir d'un appel-contre-appel de la part de nos attaquants (ils sont deux, pourtant), suivi d'un bon centre en retrait de la part de nos latéraux. Cabot est droitier jusqu'à preuve du contraire, mais il préfère rentrer dans l'axe et mettre un centre au niveau du genou avec son pied gauche plutôt que de percuter/dédoubler sur son côté.
J'ai bien peur qu'avec une telle faiblesse tactique on se contente de faire des coups de temps en temps, en abandonnant le jeu à l'adversaire et en comptant sur la vitesse de nos joueurs pour mener des contre-attaques rapides. On l'a vu récemment, les matches où nos attaques fonctionnent bien sont celles où on tombe contre une défense pas du tout concentrée, et où on lance un barrage de longs ballons dans le dos des centraux pour Wissa (encore faut-il les mettre au fond). Comme le soulignait quelqu'un un peu plus haut, ce n'est pas une tactique honteuse, beaucoup d'équipe jouent ainsi, et obtiennent de précieux succès en s'appuyant sur une défense solide et une attaque réaliste et tranchante. Sauf que ça ne colle pas avec le discours ambitieux du début de saison sur la remontée, ça ne colle pas avec l'envie de redonner du plaisir aux supporters, et ça ne colle pas non plus avec le "football autrement" qui est une vaste fumisterie.
La nullité affligeante du collectif hier soir, contre un adversaire valeureux qui n'a probablement pas joué le match le plus difficile de son histoire, est le reflet de l'insuffisance de notre coach davantage que de nos joueurs. Je ne crois pas que Cabot, Claude-Maurice ou encore Hamel soient intrinsèquement moins bons que leurs adversaires. Simplement, leurs qualités ne sont jamais mises en valeur, et ils jouent de manière limitée. ACM est un Bouanga bis, Cabot reproduit encore et encore les mêmes erreurs, tandis que Hamel qui est un pur finisseur ne reçoit aucun ballon face au but. On n'a aucun passeur pour lui mettre un ballon jouable (Claude-Maurice et Cabot, qui pourraient jouer comme milieu créateurs excentrés, ne délivrent aucune passe dans l'intervalle).
En 442, une paire de récupérateurs sans capacité de création, c'est l'assurance de ne pas pouvoir jouer rapidement vers l'avant, et de pouvoir mener un contre (ce qui est essentiel contre une équipe venue pour défendre, pour exploiter les rares moments de déséquilibre). J'ai du mal à comprendre comment on peut aligner une équipe coupée en deux, avec six joueurs à vocation défensive, et cinq joueurs à vocation offensive, sans joueurs pour faire le lien. Etuin ou Ponceau, voire même des joueurs comme Le Fée, avaient le profil pour forcer la décision en gardant le ballon plus facilement, en sécurisant les transmissions, et en trouvant les décalages. Wadja, Sarr et Courtet ont eu l'air d'éléphants en ballerines, maladroits et gauches, lents à se retourner et à se mettre en position de délivrer une bonne passe ou une frappe.
Landreau semble bien incapable de voir le décalage entre ce qu'il demande à ses joueurs et ce qu'ils sont capables de produire (Courtet en est le meilleur exemple), et d'un point de vue tactique il crée un schéma dans lequel ses joueurs semblent perdus (l'entrée de Ponceau en tant que milieu droit a-t-elle répondu à une stratégie ? Quelle était sa consigne ?). Les conférences de presse, qui sont censées répondre aux interrogations légitimes des supporters, m'inquiètent toujours plus quant à la capacité de l'entraîneur à faire face à ses erreurs. Pour finir, les déclarations surréalistes de Cabot sur le public sont une insulte à la persévérance des derniers fidèles qui viennent dans la villa des courants d'air qu'est le Moustoir. La bouillie de football produite depuis trop longtemps n'est pas au goût d'un public qui a conscience de ce qu'on lui sert. Quand je pense que Cabot a fait la tête après le but de Claude-Maurice la semaine dernière...
Ce groupe vit beaucoup moins bien que Landreau veut nous le faire croire, et j'ai l'impression qu'il y a quelque chose de pourri au sein du club, à la fois au niveau de la tête et du corps. L'heure est grave, et personne ne semble s'inquiéter.
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